Patrick Corillon & Srinivasa Prasad

Du jeudi 12 décembre au samedi 28 décembre 2013
Du mercredi au samedi de 14 à 18h

Exposition des travaux de l’artiste belge Patrick Corillon et de l’artiste indien Srinivasa Prasad, dans le cadre du parcours « Water Art Walk » à l’occasion du festival international des arts Europalia India. Cette nouvelle exposition sur le thème de l’eau prend le parti de confronter deux univers artistiques à priori éloignés l’un de l’autre.

Les Drapiers ont demandé à Patrick Corillon de sélectionner dans ses œuvres précédentes celles ayant un lien avec le thème de l’exposition. Ce regard rétrospectif porté sur son travail personnel est l’occasion pour l’artiste de réaliser la récurrence de ce thème. En plus de ce rassemblement, l’artiste propose également une nouvelle œuvre pour l’occasion « les motifs de la mer ». Si la thématique de l’exposition peut faire appel à des questions environnementales, les œuvres établissent des liens avec la symbolique de l’eau dans la poésie, les contes, les mythes, l’imaginaire ou encore dans certaines cultures et certains rituels.Patrick Corillon, dont le travail se situe à la frontière entre le théâtre et les arts plastiques, viendra périodiquement animer l’œuvre avec des récits.

Srinivasa Prasad, en résidence à Liège depuis un mois, s’est librement inspiré du lieu pour son travail. Il propose deux œuvres in situ, inscrites dans l’espace même d’exposition. Intéressé par les possibilités qu’offre la matérialité même du thème, l’artiste prend l’eau comme base principale pour ses travaux. Le temps, le silence, la concentration et l’application répétée de l’index de l’artiste sur les parois de la pièce ont donné naissance à son œuvre « Impressions ». Constitué d’argile, de terre et d’eau, le dessin mural investit littéralement la totalité d’une salle de la galerie. Dans son second travail, l’artiste se penche de manière ludique sur la notion de mémoire et l’amène dans le champ visuel d’une manière performative. Il trace, avec de l’eau sur une ardoise d’école chauffée, les souvenirs qu’il souhaiterait oublier. L’ensemble du processus de l’œuvre constitue alors un effacement symbolique de l’indésirable. L’eau, nettoyant universel, s’évapore et les souvenirs remontés un instant à la surface également. Le dispositif invite le public à faire de même, rappelant combien l’oubli est un remède naturel.

En images

Srinivasa Prasad

né en 1974 à Bangalore en Inde

Le langage artistique de Prasad se fonde sur certains principes fondamentaux de la signification et de la participation. Ses deux sources d’inspiration sont les souvenirs d’une enfance passée dans les régions rurales du Karnataka et de l’expérience des villes de Bangalore. Cette dualité se manifeste dans sa prédilection pour les matériaux naturels et les processus élémentaires liées au quotidien ainsi que de leurs symbolismes sacrés. Avec le désir d’évoquer un univers esthétique ainsi qu’un monde réel, Prasad conceptualise et construit des espaces en perpétuelle mutation. Leur dynamisme inhérent rappelle d’anciens rituels de l’agriculture, le cycle de la vie et la mort ainsi que de la présence de l’artiste-interprète. Inévitablement, ces travaux physiquement et émotionnellement forts ne sont pas juste destinés à la contemplation, mais faits pour être vécu individuellement et de façon multi-sensorielle. Pour Srinivasa Prasad, une œuvre d’art existe par le fait qu’elle est éprouvée par un public et donc encrée dans un lieu dont elle ne peut être dissociée. L’expérience esthétique est ici avant tout une expérience de soi, éprouver le fait d’être à un certain moment à un certain endroit, dans un espace particulier, un espace qui n’est ni un lieu de consommation, ni un moyen de transport, ni chez soi, un espace nouveau, inconnu, crée pour rappeler le réel même, celui qui disparaît derrière le quotidien, derrière les images qui construisent l’architecture des villes, derrière la technologie qui nous donne accès à l’immatérialité. Ainsi se trouver dans un lieu spécifique qui confère à l’être son unicité dans un ici et maintenant réunis est rare, et c’est cet espace que l’artiste construit pour nous. L’aboutissement des explorations de Prasad aboutissent à trois œuvres in situ.

L’artiste plasticien présente deux œuvres aux Drapiers (Mémoires Evanescentes etImpressions) et la dernière, Brouillard, sur le site de l’areine de Richonfontaine.Dans son travail, la question du spectateur est essentielle. Srinivasa Prasad pause également la question du pouvoir de l’art à faire éprouver, ressentir au public le non formulé.

Mémoires Evanescentes (installation table, ardoise, eau, éther)

L’artiste écrit ses pensées et ses souvenirs indésirables avec de l’eau sur une ardoise chauffée. La trace invisible se perd dans l’oubli et les choses formulées un instant aussi. Srinivasa Prasad rappelle avec poésie que l’oubli est un remède naturel pour de nombreux problèmes psychologiques et combien il est inimaginable de vivre sous le poids de souvenirs innombrables. C’est un réflexe presque naturelle que d’alléger sa mémoire. L’ensemble du processus est un effacement symbolique de l’indésirable. L’eau, l’ultime nettoyant universel s’évapore… Ici, l’artiste se penche de manière ludique sur la nature de la mémoire et l’effacement de celle-ci et l’amène dans le champ visuel d’une manière performative.

Espace intérieur et extérieur de l’être, créer un espace d’expression plastique qui tout en sortent de l’individu, par l’expression de la parole, reste intérieur et secrète puisque le geste d’écrire libère mais n’est pas visible par les autres personnes. C’est donc une expression de soi, une manière de livrer ses secrets peut être désagréable, l’artiste offre la possibilité de s’en débarrasser par une parole muette, sans que cette denier ne gène, ne face du mal. C’est-à-dire que la dualité Parler ou se taire, révéler ou cacher n’est plus une dualité, n’est plus un dilemme. Puisque la parole libérée ne sera que matériellement éphémère et existera et l’entourage du spectateur ne pourra y avoir accès ou la lire. L’artiste soulève une autre dualité : oublier ou parler. Comment se libérer, comment mettre à distance un souvenir difficile, un poids ? Une écriture sans trace, sans témoin hormis soi-même.

Impressions (boue et eau sur murs, fenêtre et plafond)

L’artiste s’inspire directement du site et répond par un travail en résonnance avec son appréhension personnelle du lieux. Ainsi la boue provenant de l’extérieur envahit progressivement l’espace intérieur, aux murs grumeleux, parfois irréguliers. Srinivasa Prasad instaure un dialogue entre les carreaux du sol de la pièce et le dessin qui pourrait être leurs reflets, ces îlots de boue deviennent alors les pavés d’une rue, l’aspect des chemins boueux après la pluie. Le sol et le plafond s’inversent alors et le spectateur perd pied un instant dans l’œuvre.

Srinivasa Prasad emploie une technique de dessin proche de l’art traditionnel indien. La beauté de la Terre se trouve dans son caractère fertile. L’artiste cherche à faire surgir le réel, travaillant avec la matérialité et l’apparence même de la boue. Evoquant des vues aériennes de champs agricoles, de concentrations urbaines ou encore de paysages inondés, les sillons blancs se métamorphosent en chemins ou en ruisseaux, délimitant de nouveaux territoires, la pièce se transforme une nouvelle fois. Explorant les murs, parcourant le plafond, les yeux s’efforcent de trouver le chemin dans ce labyrinthe aux formes poétiques.

Le temps, le silence, la concentration et l’application minutieuse et répétée de l’index de l’artiste des centaines, voire des milliers de fois, ont donné naissance à l’œuvre. Srinivasa Prasad prend possession du lieux et interroge par là même la notion de mémoire. Le dessin constitue alors la trace d’une présence en action dont les murs sont les gardiens. Il semble qu’une présence invisible habite la pièce.

Dans une époque dans laquelle la rapidité et l’utilité sont de mise, l’œuvre se place à contre courant avec des allures de recueillement. C’est une activité presque méditative, un retour à soi dans le silence, une prise de conscience de l’espace dans lequel évolue son corps que l’artiste nous amène. Les différents sens de l’œuvre prennent forme dans l’espace.

Brouillard(installation son et lumière)

L’artiste investit le site sous-terrain de l’areine de Richonfontaine, bâti sur le cours d’eau d’une source naturelle. Construite à l’origine pour apporter l’eau potable à la ville, son utilité a changé au fil du temps. L’eau est désormais redistribuée dans les fontaines de la ville, avant de se jeter dans le fleuve. Srinivasa Prasad nous donne l’occasion de (re)découvrir ce lieu sous-terrain habituellement fermé au public mais aussi oublié du public. Il ne s’agit ici pas d’une visite guidée des souterrains de la ville, encore mois d’une mis en contexte du lieu à l’époque. Comment découvrir un site historique sans la visibilité? Comment appréhender l’inconnu ? C’est ces questions que pose l’artiste au public tandis qu’il met en exergue ses sens.

Site oublié, lieu inconnu, l’artiste rappelle combien on a tendance à oublier, à imaginer ce qui est hors de la portée des yeux au quotidien. En effet, l’œuvre crée un sentiment perturbant. L’atmosphère, brumeuse, évanescente, l’odeur terreuse, le clic ti de l’eau sont les seuls points d’encrage auxquels peut se rattacher le spectateur pour prendre connaissance du lieu et se repérer.

Dans la sollicitude permanente de la vue par notre société consommatrice d’images et fascinée par le virtuel, notre appréhension du monde est de moins en moins complète. L’installation devient le prétexte à réutiliser une sensualité perdue mais aussi à se renouer avec le réel. La découverte se fait donc sans la vue dans une obscurité qui met en exergue le sens du touché, l’odorat, l’ouïe. L’œuvre révèle un lieu qui ayant perdu sa fonction est devenu un non-lieu, soustrait aux activités et au rythme de la ville. Dans ce monde obscure, le spectateur éprouve avec nostalgie la perte de quelques chose.

50° nord

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Intangibles

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