Narration Textile

Anais Beaulieu (FR), Brodette (B), Peter Frederiksen (USA), Richard Saja (USA), Martha Samyn(B) & Samuel Trenquier(B)

Du samedi 4 septembre au samedi 23 octobre 2021
Exposition accessible du jeudi au samedi de 14h à 18h
Peter Frederiksen, Some time outside, broderie machine, 2021

Selfies tuftés, broderies animées, chimères 2.0 feutrées, mouchoirs pimpés, violences policières immortalisées à l’aiguille ou toile de Jouy travestie, tout est bon pour entrechoquer histoire du textile, actualité, imaginaire collectif et fiction personnelle.

Depuis toujours, le textile est porteur de récit. De la tapisserie de Bayeux, fresque narrative et guerrière aux travaux d’aiguilles domestiques, c’est un support qui accueille autant les traces de notre intimité que celles de l’histoire collective.

Du 4 septembre au 23 octobre 2021, pour son exposition de rentrée, « Narration Textile », Les Drapiers ainsi que Corinne Clarysse et Dorothée Van Biesen, commissaires, proposent de découvrir le travail de six artistes internationaux confirmés ou émergeants, qui s’emparent de ces pratiques pour arrêter le temps, marquer une pause dans le tourbillon visuel qui nous assaille et nous invite ainsi à repenser ces images dont nous ne percevons parfois même plus la présence.

L’exposition “Narration Textile” plonge le visiteur dans une multitude de points de vue – tantôt sérieux, tantôt décalés et fantaisistes – et de techniques : broderie, tuftage, feutrage – comme autant de manières d’appréhender notre époque et de la restituer à travers ces gestes lents et artisanaux pour en transcender les difficultés et les contradictions.

Au fil de coton, point après point, sur un tissu d’organza, Brodette (vit et travaille à Bruxelles) immortalise des scènes de violences policières survenues en France pendant le mouvement dit « des gilets jaunes ». Perdues dans le débordement d’images dont est fait notre quotidien, ces clichés nous heurtent et sont, simultanément, oubliés, remplacés par d’autres plus “accrocheurs”. Par le geste lent et délicat de la broderie et par le recadrage, l’artiste, qui vient de terminer un cursus en Art Textile à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles, nous permet d’assimiler ces événements, de les vivre hors du flux incessant des informations, de les aborder avec plus de distance et de réflexion, pour ne plus les perdre de vue.

De même, Peter Federiksen (vit et travaille à Chicago) qui expose pour la première fois dans notre pays, a recours à l’arrêt sur image pour mettre en avant les moments de suspens des dessins animés de la Warner Bros Company. Ces captures d’écran brodées à la machine à coudre, une fois extraites et détachées du scénario principal, qu’on sait pourtant plein d’humour et de fantaisie, révèlent leur potentiel angoissant, des ponts avec les images d’actualité se créent, nous réinventons l’histoire et la tension est à son comble. Le dessin animé devenu broderie, travaillé en série, image par image, redevient film d’animation et nous invite à repenser notre rapport au temps et à la représentation.

C’est également par le biais de la broderie, savoir-faire qui lui a été transmis par sa grand-mère, que Anaïs Beaulieu (vit et travaille à Montreuil) dont c’est aussi la première apparition en Belgique, donne une signification nouvelle à des objets usuels. Sacs en plastique, mouchoirs ou gilet de sauvetage sont ornés de motifs traditionnels, de barbelés ou de coraux. Ainsi ennoblis, ces ustensiles de la vie courante acquièrent une dimension supplémentaire, une poésie non dénuée de gravité.  Leur sens premier s’additionne à l’histoire humaine universelle et rappelle à notre mémoire des récits de déracinement, de survie, de territoire malheureusement encore bien actuel.

Chez Richard Saja (vit et travaille à New-York), le support est aussi révélateur et même élément déclencheur du travail. Depuis plusieurs années maintenant, Richard, figure emblématique du renouveau des arts textiles, travestit et déguise les comtesses, bergers, lavandières et marquis des Toiles de Jouy. Transformés en monstre, en punk ou en clown, ces personnages sortent de l’anonymat imposé par la répétition « à l’infini » du motif. La toile de Jouy est comme un livre de coloriage que l’artiste, jouant des couleurs et textures, détourne et subvertit au gré de ses envies et de son imagination.

Martha Samyn (vit et travaille à Gand), a un plaisir similaire à s’amuser avec les nuances et les matières pour matérialiser l’humain. Sa technique de prédilection, le tuftage, lui permet de réaliser des “tapis” de grandes dimensions sur lesquels et dans lesquels on a envie de s’ébattre et de s’enrouler. Malheureusement, pour la plupart d’entre nous, l’enfant que nous étions, celui qui se serait spontanément laissé aller à des roulé-boulés joyeux, a été délaissé. Nous sommes devenus des adultes complexés, notre corps a perdu son innocence et c’est par procuration, grâce aux photographies tuftés de Martha, que nous devrons éprouver ce sentiment de liberté.

Ce lâcher-prise, nous le cherchons entre autres dans les voyages et le dépaysement. Mais de vacances exotiques, il ne fut point question ces derniers mois et si nous rêvions d’île où nous évader, nous avions recours, comme Samuel Trenquier (vit et travaille à Bruxelles), aux livres et pourquoi pas à l’histoire de Robinson Crusoé. Le célèbre naufragé au chapeau tressé et son compagnon Vendredi, inspire l’artiste et guide son aiguille à feutrer pour produire des sculptures foisonnantes où nature luxuriante et une certaine esthétique urbaine se mêlent, inventant des va et vient entre vie sauvage et citadine.

Informations pratiques

Du 4 septembre au 23 octobre 2021
Exposition accessible du jeudi au samedi de 14h à 18h
En dehors de cet horaire, possibilité de rendez-vous.
Vernissage le samedi 4 septembre de 16h à 19h.
Accès libre

Samedi 2 octobre à 15h sur réservation
Présentation de livres d’artistes textiles par le CLA avec la participation de Marie Van Roey et Christèle Simonard

Partenaires et soutiens

Actuellement aux drapiers

Intangibles

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Ouvert du jeudi au samedi de 14h à 18h
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Peter Frederiksen, Some time outside, broderie machine, 2021